Les fuites urinaires chez la femme : traiter en douceur
On estime qu’en France plus de 3 millions de femmes présentent des problèmes d’incontinence urinaire. Une femme sur dix est ainsi gênée dans sa vie professionnelle, sociale et familiale. Le plus souvent, par pudeur, ces femmes n’osent pas se confier à leur médecin : les fuites d’urine sont trop souvent considérées comme une fatalité. Et pourtant des solutions existent. Les enquêtes réalisées chez les patientes opérées montrent un taux de satisfaction de plus de 95%.
Il existe en fait 2 grandes formes d’incontinence : celle dite par « instabilité » et celle dite » d’effort « . Dans le premier cas, la vessie a des contractions anormales entraînant une envie pressante et incontrôlable. Ces envies sont volontiers déclenchées par des circonstances comme la prise d’une douche ou le simple bruit de l’eau. Le traitement fait appel à une meilleure hygiène de vie (diminution des excitants comme le café), à des médicaments et à la rééducation par des séances de kinésithérapie (kiné ou sage-femme spécialisée).
L’incontinence urinaire » d’effort » est liée à une faiblesse des muscles et des ligaments qui soutiennent la vessie. Les accouchements sont une des causes les plus fréquentes. Elle peut donc toucher les femmes jeunes. La perte d’urine survient quand on fait un effort : en portant son enfant, en jouant au tennis ou en toussant par exemple. Cette forme d’incontinence se traite par séances de kinésithérapie, et ensuite éventuellement par chirurgie.
Les 2 types d’incontinence (à l’effort et par impériosités) peuvent coexister : on parle alors d’incontinence urinaire mixte.
La rééducation du périnée : à essayer d’abord !
Le médecin conseille en général une prise en charge par kinésithérapie réalisée par un kiné ou une sage-femme spécialisée. Le thérapeute fait prendre conscience à la patiente du rôle important des muscles du plancher de l’abdomen. Il enseigne le verrouillage périnéal à l’effort, c’est-à-dire la contraction de ces muscles pendant un effort. Il peut s’aider d’une petite sonde vaginale reliée à un appareil enregistrant les contractions (le biofeedback) ou stimulant de façon indolore ces muscles (l’électro-stimulation). Après 10 ou 20 séances, la patiente doit noter une amélioration de ses symptômes.
Une bandelette de soutien très résistante
La chirurgie s’adresse aux patientes qui souffrent d’incontinence urinaire d’effort invalidante. Quel est son principe ? Rappel : les urines sont stockées dans la vessie et évacuées par le canal de l’urètre. L’intervention consiste à poser une petite bandelette sous l’urètre de façon à former un petit hamac. Cette bandelette a l’aspect d’un tulle blanc, elle est large d’1 cm et longue de 10 cm.
Comment se déroule l’intervention ?
L’intervention est réalisée par les voies naturelles. La bandelette est introduite par une courte incision dans le vagin, juste sous le méat urétral (orifice de sortie de l’urine). La bandelette sort soit au niveau du pubis (TVT Tension Free Vaginal Tape), soit latéralement à la face interne des cuisses (TOT Trans Obturator Tape). La patiente sort le jour même le plus souvent après qu’on a vérifié que sa vessie se vide bien. Il est intéressant de noter que le résultat sur la continence est immédiat et peut être évalué en demandant à la patiente de tousser : les fuites ont disparu.
Quels sont les risques de l’intervention ?
Cette intervention mini-invasive est très peu douloureuse. La patiente ne présente en effet qu’une petite cicatrice non visible au niveau vaginal et deux petites incisions de 5 mm au niveau des points de sortie de la bandelette. Les fils utilisés pour fermer ces incisions se résorbent tout seuls.
Quelques patientes décrivent des petites sensations de brûlures vésicales qui peuvent s’expliquer par la sonde posée durant l’intervention. D’autres décrivent de petites douleurs à la face interne des cuisses du fait du passage à cet endroit de la bandelette mais là encore les douleurs sont très modérées. Quelques rares troubles de perception lors des rapports ont été décrits.
Le risque le plus important est de trop serrer la bandelette et d’obtenir une vessie qui ne se vide plus. Il faut dans ce cas réopérer très rapidement et desserrer la bandelette.
La prothèse normalement située sous la muqueuse vaginale reste invisible et imperceptible. Parfois (dans 5% des cas) la bandelette devient visible dans le vagin en quelques mois et peut gêner le conjoint. Cette complication entraîne souvent le retrait chirurgical de la bandelette et une nouvelle pose.
Enfin, il y a un risque d’échec qui peut être mieux prévu en faisant réaliser avant l’intervention, un bilan uro-dynamique (mesure des pressions dans les voies urinaires).
Combien de temps vais-je rester à l’hôpital ?
En règle générale, vous rentrez le matin de l’intervention. vous sortez le jour même ou le lendemain.
Quels conseils donnez-vous à la sortie ?
Vous pouvez saigner un peu rouge-vif une dizaine de jours après l’intervention. C’est normal, cela correspond à la chute de la petite cicatrice formée sur le vagin après l’intervention.
Vous devez en principe déjà ressentir l’efficacité de l’intervention, c’est-à-dire la très nette diminution ou disparition totale des fuites. Le résultat maximum est obtenu à trois mois.
Il est normal que les mictions soient souvent en deux temps : après avoir eu l’impression de vider complètement la vessie, vous pouvez vous apercevoir qu’il reste encore des urines à évacuer.
Il arrive que la bandelette et les petits hématomes (transitoires) autour de la vessie entraînent une envie plus fréquente d’aller uriner. Cela est normal et va rentrer dans l’ordre en une quinzaine de jours.
Exceptionnellement, il peut même arriver qu’une chasse vésicale se produise, c’est-à-dire que vous perdiez brutalement et totalement toutes vos urines.
Les douches sont possibles dès ce jour. Les bains sont possibles dans une semaine. Le port de tampons et les rapports sont possibles dans un mois.
Vous sortez assez rapidement après l’intervention ce qui signifie que les suites opératoires initiales ont été normales. Cependant cela ne signifie pas que tous les problèmes sont réglés. Voici ce qui n’est pas normal et qui doit vous inciter à me contacter ou à vous présenter aux urgences :
L’apparition d’une fièvre (supérieure à 38°). Merci de prendre votre température jusqu’au 5e jour après l’intervention, et ensuite si vous aviez l’impression d’avoir de la fièvre.
Une impossibilité d’uriner, des urines « bloquées ». Allez directement aux urgences.
Je vous invite vivement à être active et à ne pas rester couchée. Vous devez marcher, sortir. Vous pouvez faire de la voiture ou aller au cinéma ! Simplement, ne portez pas lourd.
Quelle est la durée de vie de la bandelette posée, faut-il se faire reposer une bandelette après un certain nombre d’années ?
Les premières bandelettes ont été posées en 1996 : nous disposons d’un recul important. La bandelette implantée est complètement incorporée dans les tissus et remplace les ligaments déficients. Plusieurs études semblent confirmer que les excellents résultats immédiats (plus de 90% de succès) ne se dégradent pas à long terme.
Dr Vincent Ducrotoy
Chirurgien-gynécologue-obstétricien
Pour en savoir plus
Bandelette sous urétrale par voie rétropubienne (TVT) pour cure d’incontinence urinaire d’effort chez la femme – Fiche d’information patiente éditée par l’AFU (2018).